La cholangite féline

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Les maladies inflammatoires du foie sont très fréquentes chez le chat.
Le terme cholangite semble être désormais préféré au terme cholangiohépatite pour désigner une inflammation du foie.

Le mot « cholangite » reflèterait mieux les anomalies histopathologiques retrouvées, centrées sur les canaux biliaires et impliquant secondairement le foie.

On classe les cholangites en 3 catégories : la cholangite neutrophilique, la lymphocytaire et la chronique.

La cholangite neutrophilique :

C’est la plus fréquente selon de nombreux articles (50 à 90% des maladies inflammatoires du foie). La plupart des cholangites neutrophiliques sont présentes à la suite d’infections bactériennes. D’autres affections sont souvent présentes comme une pancréatite ou une inflammation chronique de l’intestin. Ces 2 affections forment classiquement avec la cholangite ce qu’on appelle la « triade féline ».

Chez le chat, il y a une particularité anatomique : le conduit des voies biliaires et le conduit pancréatique rejoignent le duodénum par la même « papille duodénale majeure».  Ceci favorise les infections ascendantes. Ainsi, une pancréatite et une inflammation digestive pourraient être la conséquence d’une cholangite neutrophilique.

Quels sont les symptômes ?

Les propriétaires rapportent souvent des symptômes tels qu’une léthargie, une dysorexie voire une anorexie, des troubles digestifs tels que des vomissements, diarrhées et une perte de poids.

Le chat est alors souvent déshydraté, ictérique (muqueuses jaunes), avec une salivation excessive et une douleur abdominale à la palpation.

Parmi les anomalies sanguines souvent présentes, on retrouve des élévations des enzymes hépatiques, de la bilirubinémie, des altérations de la numération et formule sanguine, et des temps de coagulation parfois augmentés…

Il est important de noter que pour le moment, il n’existerait pas de corrélation reconnue entre l’infection par un virus FIV ou FelV.

Des anomalies échographiques sont parfois présentes, mais une échographie normale n’exclue pas une cholangite. Lors de cholangite, l’échographie peut révéler un épaississement et une irrégularité de la paroi de la vésicule biliaire, une dilatation des conduits biliaires qui sont plus tortueux, des anomalies du parenchyme hépatique et parfois des calculs biliaires.

Une culture bactérienne est parfois nécessaire, à partir de prélèvement de bile ou de biopsie du foie. Un prélèvement échoguidé de bile (cholecystocentèse échoguidée) est souvent recommandé lors de suspicion de cholangite neutrophilique.

Il est important de noter qu’on obtiendrait une culture bactérienne positive plus fréquemment avec un prélèvement de bile qu’une biopsie hépatique. D’autres méthodes de prélèvement sont possibles ( cholecystocentèse par laparotomie, biopsie hépatique échoguidée, aspiration hépatique à l’aiguille fine…)..

Les bactéries les plus souvent retrouvées sont : Escherichia coli, Enterococcus faecalis, Streptococcus faecalis et Clostridium perfringens entre autres…

Parmi les facteurs pouvant favoriser une infection biliaire persistante, on retrouve les calculs biliaires, une obstruction des conduits biliaires, une tumeur hépatique, une anomalie congénitale, une maladie extra-hépatique comme une inflammation intestinale ou une pancréatite, ou une inflammation pré-existante du foie.

Une cytologie du foie par aspiration à l’aiguille fine révèle seulement rarement la présence de bactéries ou une inflammation neutrophilique peu spécifique, mais elle peut révéler une lipidose hépatique ou la présence d’un lymphome.

Une biopsie hépatique, avec analyse histopatholgique est souvent nécessaire si l’on veut poser un diagnostic définitif, mais elle n’est pas toujours possible (patient trop faible pour supporter une anesthésie…).  Cet examen nécessite de multiples prélèvements hépatiques car les figures inflammatoires sont réparties un peu partout dans le foie. Un traitement « à l’aveugle » basé sur la suspicion de cholangite neutrophilique est alors souvent mis en place.

Quel traitement ?

Le traitement d’une cholangite repose souvent sur un traitement antibiotique basé sur la culture bactérienne réalisée et un antibiogramme montrant à quel antibiotique la bactérie isolée est sensible. Une initialisation du traitement antibiotique par un traitement intraveineux est parfois nécessaire. Ce traitement antibiotique est souvent prescrit sur 4 à 6 semaines, à discrétion de la prescription de votre vétérinaire.

Un traitement antiparasitaire peut également être envisagé.

Une hospitalisation de une à deux semaines avec mise sous perfusion est souvent nécessaire, pour réhydrater votre chat et rééquilibrer sa balance électrolytique  et vitaminique (il y a parfois une hypokaliémie qui se met en place et qui doit être corrigée).

D’autres médicaments de soutien tels que le S- adénosylméthionine pour le soutien de la fonction hépatique, ou de l’acide urso-désoxycholique pour aider à la vidange biliaire. Ils peuvent être utilisés aussi bien lors de cholangite neutrophilique que lymphoplasmocytaire.

Parfois, la prise alimentaire doit être « forcée » avec notamment une sonde naso-oesophagienne. Un traitement analgésique est souvent recommandé, à base d’opioïdes notamment et peut être donné en hospitalisation.

Des anti-inflammatoires non stéroïdiens sont souvent contre indiqués dans ce cas de figure à cause notamment de la déshydratation du chat, de ses vomissements, diarrhées et nausées à cause de leurs effets secondaires rénaux et gastro-intestinaux. Par contre, des anti-inflammatoires stéroïdiens comme des corticoïdes (prednisolone à 1 mg/kg/jour par exemple) peuvent être indiqués lors de cholangite lymphocytaire.

Les troubles  éventuels de la coagulation doivent aussi être pris en charge s’ils sont présents, et peuvent contre-indiquer des prélèvements comme des biopsies hépatiques.

Les maladies concomitantes sont aussi prises en charges lors de l’hospitalisation.

Le pronostic est généralement très bon, sauf si les affections concomitantes sont difficiles à traiter.

La cholangite lymphocytaire :

Les données sur la cholangite lymphocytaire sont plus éparses et plus contradictoires.

La prévalence de cette affection serait beaucoup plus faible que la cholangite neutrophilique. Certaines analyses révèlent même la présence de cette cholangite sur des chats asymptomatiques… et il n’y a pour l’instant aucune explication à cela. Les chats Persans et chats des Forêts Norvégiennes seraient plus enclins à développer cette affection (selon des études au Royaume-Uni et aux pays bas).

Une infiltration lymphocytaire du foie serait compatible avec une hypothèse d’origine auto-immune. Certains auteurs suspectent qu’une infection bactérienne transitoire pourrait déclencher une réponse inflammatoire hépatique, mais il n’y a aucune preuve de cela. La présence de bactéries dans la bile aurait aussi été mise en évidence chez des chats sains. Ainsi, des traitements antibiotiques ne sont pas souvent recommandés dans ce cas.

La maladie serait plus évolutive que la cholangite neutrophilique et les propriétaires rapporteraient souvent des symptômes évoluant sur plusieurs semaines voire plusieurs mois. Les chats touchés peuvent aussi être alertes et complètement asymptomatiques.

Quels symptômes ?

Parmi les symptômes souvent rapportés, on retrouve une perte de poids, un appétit augmenté ou au contraire une anorexie, des vomissements, une léthargie et une augmentation de la prise de boisson et d’émission d’urines.

À l’examen clinique on peut parfois remarquer un ictère (muqueuses jaunes), un foie de taille augmenté (hépatomégalie), un épanchement liquidien abdominal. Contrairement à une cholangite neutrophilique, la salivation excessive n’est que très rarement constatée.

Des anomalies sanguines peuvent être présentes, mais diffèrent de celles retrouvées lors de cholangite neutrophilique. En effet, la numération et formule sanguine est souvent normale, les enzymes hépatiques et la bilirubinémie peuvent être élevées mais dans une moindre mesure que dans la cholangite neutrophilique.

On constate souvent une hypoalbuminémie majeure accompagnée d’une hyperglobulinémie secondaire à une augmentation des gammagmobulines. Il arrive parfois que les temps de coagulation soient augmentés. Comme pour la cholangite neutrophilique, il n’y aurait pas d’association décrite avec un statut rétroviral.

Un épanchement abdominal modéré à une ascite marquée peuvent fréquemment se développer. Une analyse de ce liquide abdominal révèle souvent une concentration élevée de protéines avec un taux de globulines augmenté, de petits lymphocytes et des neutrophiles non dégénératifs, ainsi que d’autres cellules de l’inflammation.

Les examens d’imagerie peuvent révéler une hépatomégalie ou une ascite, une adénomégalie des noeuds lymphatiques abdominaux et un remaniement du parenchyme hépatique.

Les maladies associées à une cholangite lymphocytaire ne sont pas aussi bien élucidées que pour la cholangite neutrophilique.

Quel traitement ?

Le traitement d’une cholangite lymphocytaire comprend des doses immunosuppressives de prednisolone, et/ou de l’acide urso-desoxycholique, et parfois du nursing (gestion de la douleur, sondes naso-oesophagiennes…).

Une infestation du foie par des trématodes  appartenant à la famille des Dicrocoeliidae et des Opisthorchiidae peut induire une cholangite chronique. Une analyse de selles peut aider au diagnostic, mais une coprologie négative n’exclue pas l’infection. Un traitement au Praziquantel est efficace dans la plupart des cas.

 

En conclusion, les cholangites comprennent plusieurs origines pathologiques, et il est important de rechercher les maladies concomitantes. Le pronostic est souvent bon et nécessite une prise en charge adaptée et parfois intensive.

Des recherches complémentaires sont nécessaires pour élucider les conditions de mise en place d’une cholangite lymphocytaire.

Auteur : Alexandra de Nazelle
Docteur vétérinaire, CEAV Médecine Interne
Date : Janvier 2017

 

Bibliographie
Lara Boland, Feline Cholangitis, Veterinary Clinics of North America: Small Animal Practice, Available online 6 January 2017
Thèse vétérinaire, ÉTUDE RÉTROSPECTIVE DES CAS DE CHOLANGITES FÉLINES RENCONTRÉS À L’ENVA ENTRE 2007 ET 2013, Alexis Racine, 2015

 

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